Marie Vitoux : portrait d’une écologiste féministe et combative
Dans cette interview, Marie Vitoux, cheffe de file du mouvement Ambitions Communes à Nantes, revient sur les racines de son engagement politique : de son indignation enfantine face aux injustices jusqu’à son entrée dans les luttes locales en tant qu’élue écologiste. Elle nous partage un parcours marqué par la solidarité, la justice sociale, le droit au logement et le combat pour les droits humains. Une discussion intime et engagée, qui dévoile les convictions profondes d’une militante de terrain, connectée au réel et résolument tournée vers l’avenir.


Par Lina B., jeune militante écologiste
Lina B. : Marie, te souviens-tu quand et comment a débuté ton engagement politique ?
Marie Vitoux : Petite, je m’indignais tellement face aux injustices que mes enseignants pariaient sur le fait que je deviendrais avocate. Il faut croire que je percevais déjà un peu les profondes inégalités qui caractérisent le système capitaliste et patriarcal ! Mais je dirais que le premier grand marqueur, c’est la catastrophe de l’Erika en 1999. Je me souviens, comme si c’était hier, de ces journées que j’ai passé avec mes parents à nettoyer la plage du Croisic. Le second marqueur, c’est l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au 2ème tour des élections présidentielles en 2002. Un choc ! Puis, à partir du lycée et à l’université j’ai beaucoup battu le pavé : pour l’emploi des jeunes, contre les réformes universitaires et celle des retraites.
Lina : Et alors, t’es-tu orientée vers le droit comme le pressentaient tes premiers profs ?
Marie : Pas exactement ! Ma curiosité m’a d’abord menée vers une classe préparatoire littéraire et un master de géographie. La philo, les inégalités nord-sud et ma découverte des conditions de vie du peuple ouïghour exacerbent mon indignation. Ma soif de justice sociale et ma compréhension des mécanismes de domination ne font alors que grandir ; et j'obtiens, en parallèle, mon diplôme d'urbaniste.
Lina : Quel est ton parcours professionnel à cette époque ?
Marie : A l’issue de mes études, je choisis de travailler dans le secteur du logement social et du droit au logement, en Région Parisienne puis à Saint Nazaire. J’y consacre toujours une partie de mon temps aujourd’hui car, en plus de donner ponctuellement des cours sur le logement social, je travaille également auprès de collectifs de bailleurs sociaux. C’est vraiment important pour moi de rester présente sur le terrain, sur tous les terrains même ! D’avoir un boulot et des collègues, d’être présente dans la rue lors des mobilisations, dans mon quartier pour discuter avec les habitants, de participer à la vie de toutes les institutions auxquelles le statut d’élue donne accès. Comment peut-on prétendre exercer correctement de telles fonctions et responsabilités sans être 100% connecté au terrain, au réel ?
Lina : A quel moment t’es-tu engagée dans des structures politiques ?
Marie : Je suis arrivée à la politique par le biais de mon engagement auprès du peuple palestinien. Avant cela, je me considérais comme très politisée mais je n’avais jamais osé pousser la porte d’une organisation politique. Je me suis toujours battue, je l’ai dit, pour la justice sociale, la protection de notre cadre de vie, les droits des femmes mais jamais dans un cadre purement “militant”. Finalement, en 2019, une copine de l’Association France Palestine Solidarité me parle de la réunion de lancement du travail des écologistes pour les municipales de 2020 à Nantes. J’y vais, intéressée par la manière dont on peut réellement faire bouger les lignes à l’échelle locale. C’est comme cela que je rejoins la dynamique citoyenne et participe à l’écriture du programme de la liste Nantes Ensemble, menée par Julie Laernoes. A l’issue des élections et de la fusion de notre liste avec celle de Johanna Rolland au 2ème tour, je deviens conseillère municipale chargée de la mixité et de la diversité dans l'emploi ainsi que de Économie Sociale et Solidaire. Je deviens également conseillère métropolitaine.
Lina : C’était la première fois que tu exerçais des fonctions d’élue. Comment ça s’est passé pour toi ?
Marie : Oui, c’était un milieu qui m’était alors inconnu mais j’ai rapidement pris mes marques, notamment au sein du groupe des élu·es écologistes et citoyen·nes. Au fil du temps, j’ai pris davantage de responsabilités, jusqu’à devenir co-présidente du groupe à la ville de Nantes. J’anime notre collectif d’élu·es, je porte nos combats et notre vision politique auprès des habitant·es, des médias, des autres groupes politiques… Aujourd’hui, j’ai le sentiment d’être reconnue parmi mes pairs pour mes combats féministes, pour mes positions et mon expertise en matière de logement aussi. Je pense ici par exemple à l’encadrement des loyers pour lequel nous nous sommes longuement battus mais aussi aux impératifs de construction et rénovation du logement social à Nantes et sur la Métropole. Mon engagement en matière de justice et de lutte contre les discriminations est également au cœur de mon mandat d’élue. C’est pour ça que, dans toutes les instances, je rappelle notre opposition totale au projet d’implantation d’un Centre de Rétention Administrative à Nantes. Et puis, bien sûr, je suis impliquée au quotidien à Nantes Sud, quartier dont je suis devenue adjointe. Il est essentiel pour moi d’être à l’écoute des habitant·es, des associations et des structures du territoire.
Lina : A l’automne 2024, tu as été désignée cheffe de file par les militant·es Les Ecologistes et les adhérent·es d’AVEC, l’association citoyenne écologiste, en vue des municipales 2026. Qu’est-ce que ça représente ?
Marie : Un véritable honneur déjà ! Je l’ai affirmé au cours du processus de désignation, je suis déterminée à incarner les valeurs de collectif, de démocratie et d’humanisme qui caractérisent les écologistes. Dans le contexte d’extrême-droitisation fulgurant de notre société, j’ai aussi pour mission d’échanger avec TOUTES les forces politiques de gauche. On a vu le vent d’espoir qui s’est levé à l’été 2024 avec le Nouveau Front Populaire. Cette alliance était attendue de longue date par nos concitoyen·nes, elle a su faire vibrer et redonner confiance. C’est cette vision, ce sont nos ambitions communes qui m’animent au quotidien. Et, je continuerai dans cette voie avec l’énergie et la combativité qui me caractérisent.
Lina : Déterminée, énergique, combative. Te définirais-tu comme une écologiste radicale ?
Marie : Je laisserai celles et ceux qui aiment mettre les gens dans des cases se prononcer ! Dans tous les cas, je me sens ancrée, ma ligne politique est claire, mon engagement sans faille. L’urgence climatique et démocratique menacent notre avenir, nous n’avons pas le luxe de l’hésitation. C’est en ce sens que je suis déterminée à faire grandir la dynamique de l’écologie politique à Nantes, et à la faire gagner !